15 Avril 2022
Parmi les fleurs qui symbolisent l’arrivée du printemps, pour moi, il y a le magnolia. Peut-être parce qu’il y en avait un dans mon jardin, enfant. Je guettais les premières, toutes premières primevères jaunes, puis le soupir du forsythia… lorsqu’éclataient, soudain, abruptement, sur les tiges nues, les porcelaines du magnolia.
Depuis, j’ai pris l’habitude de parcourir ma petite ville à pied de magnolia en magnolia – je les ai quasiment tous repérés dans les jardins, surtout les plus beaux, immenses, courbant leurs branches en orbe du ciel à la terre. Moment suspendu entre deux saisons, un peu en dehors de la réalité.
Et pendant ce temps, je regarde, j’écoute, je sens, à l’affût du moindre signe du printemps naissant, les tout premiers bourgeons qui apparaissent, encore à peine visibles, les tiges des jonquilles et tulipes qui se préparent…
Et soudain, tout s’accélère, tout arrive en même temps et je n’arrive plus à suivre ; des jonquilles partout, des tulipes bientôt, et les pruniers et les cerisiers, et pommiers, et mille autres fleurs qui surgissent dans les jardins et les sous-bois. En quelques jours à peine, les arbres passent du brun au vert et les bourgeons indistincts forment une nuée de verdure naissante. Et, comme chaque année, je me dis que tout cela va trop vite, je n’arrive pas à suivre. J’ai le sentiment qu’il me faudrait rester assise sous les arbres toute la journée pour ne rien manquer du bal du printemps. Et, comme chaque année, je me sens frustrée, et j’ai l’impression d’avoir raté quelque chose de ce moment magique entre toutes les saisons.